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Genèse de " On s'refait l'match "

Par Thierry Meunier

Micro à la main, bonnet sur les oreilles, j'ai assisté à un week-end de foot chaleureux malgré la bise qui soufflait sur les terrains du sympathique club de Viré Lugny Haut Mâconnais. Ça a commencé par un bain de gamins hauts comme deux ballons avec leurs piaillements enjoués, cris aigus qui commencèrent rapidement à me chanter aux oreilles. Leurs commentaires imagés m'ont de suite raconté une histoire. L'histoire des garçons qui adorent se retrouver sur la colline bordée de vignes (ici les vignes ne sont jamais bien loin !) pour taper dans un ballon et... " sauter en l'air " comme il sera dit dans la chanson. Encouragés par leur maman souriante (" allez, boum ! "), ils roulent leurs maillots dans la terre et poursuivent l'énorme bille de cuir comme toutes les semaines sous l'œil vigilant de Jean Bat' leur entraîneur. Je ne le connais pas encore, mais c'est lui que j'entendrai le plus (" tout l'monde est prêt ? ", " ballon du match ", " jouez pas tendu les gars ! " ...). Je me rends vite compte que le VLHM a mis le paquet pour occuper les enfants du secteur et Jean Baptiste Richy, en plus de sa place dans l'équipe B, tient bien son poste d'animateur du club. A la buvette du stade St Pierre, il me confiera en riant d'un rire bien à lui, que " c'est du bonheur " tous ces jeunes passionnés de foot qui se retrouvent régulièrement. " C'est foufou " aussi parfois et ça a l'air de lui plaire... Qui sait ? c'est peut-être bien ce grain de folie qui leur donnera envie d'avoir leur musique-mascotte, leur propre " groovin'single " que je suis en train d'enregistrer... Bon, pour le grain de folie on verra plus tard. Pour le moment je me balade avec mon micro et je ne connais personne. Je suis un peu gêné mais je me dis que ça ira mieux demain...
Effectivement, le lendemain ça va mieux. Dimanche matin, je vais à la pêche... aux sons. Quand j'arrive au bord du terrain de foot de Viré, Jean Bat' me reconnaît et peut me présenter à Patrick, le président du club qui est venu encourager l'équipe des 18 ans qui joue contre Sennecey-le-Grand . C'est Patrick qui viendra dans le vestiaire, à la fin du match, s'inquiéter de la santé des joueurs (" est-ce qu'il y a des blessés ? "). Ce match - que j'ai terminé sous la buvette, ou plutôt, à l'abri de la buvette, les mains enroulées autour d'une tasse de café pour me réchauffer - ce match a été gagné par le VLHM, donc forcément, dans le vestiaire, il y avait de l'ambiance... et, au moins, là, il faisait chaud. Dans un joyeux brouillard sonore et visuel, les douches coulant à toute vapeur, j'ai pu entendre quelques commentaires sur un fameux " péno " et cette phrase énigmatique qui marquera le club, j'en suis sûr, pour des générations : " j'croyais qu'on f'sait d'la danse ! "... si, si, je vous assure ! La preuve qu'un vestiaire de footeux, c'est bourré de poésie! Décrire une action de football dans ces termes pose néanmoins question : est-ce que ce jeune joueur s'est refait une action au ralenti dans sa tête ? A-t-il eu, en plein dribble, une audition prémonitoire du groovin'single dont j'étais en train d'enregistrer les éléments ? A-t-il vu ses copains en tutu rose évoluer autour de lui ? On ne le saura peut-être jamais. A moins, tout simplement, de le lui demander !... Bon, pour les danseurs on verra plus tard...
Je suis maintenant au bord du stade St Pierre de Lugny, toujours à la pêche au son. On est dimanche après midi, il y a un beau soleil mais toujours cette bise glaciale qui ronfle dans mon micro. Jean Bat' est encore là, mais cette fois il joue. On a changé de gabarit. Les coups portent... ça s'entend. Sur la touche, c'est plus tendu aussi : les coachs, tour à tour, conseillent, rassurent, engueulent, encouragent... y'a d'la passion dans l'air : " on bouge, on bouge ! ", " garde la, garde la ! ", " pose la, pose la ! ", " simple, simple ! ", " ne fuyez pas les gars !"... Les innombrables " allez les bleus ! " - le VLHM joue en bleu - rappellent des grands moments... Bon d'accord, ce n'est pas le gros son des grands stades (pour ça il suffit d'allumer sa télé), mais j'ai du niveau sur mon enregistreur car le public est bien là, dans mon dos, perché sur une butte naturelle qui fait office de tribune où tout le monde se rassemble pour prendre de la hauteur... ça m'arrange qu'il soit groupé comme une chorale ce public... Pour le premier but (" i y est, i y est, i y est "), il fera une ovation d'exactement la durée d'un refrain : c'est pas magique ça !? Aurait-il de l'intuition ce public, en plus d'être sympathique ?! Il a bien vu le micro... jouerait-il un autre jeu ? En tout cas, son improvisation sera inscrite dans la partition... C'est drôle, j 'ai envie de lui dire merci d'être venu... Bon, en parlant de refrain, nous voilà maintenant dans les vestiaires et mon micro en prend plein la capsule... il pleut - victoire en pays de vignoble oblige - il pleut du Crémant de Bourgogne ! C'est la liesse mais moi, désolé, je ne participe pas. Je suis plutôt stressé, partagé entre l'envie de quitter cette fournaise pour sauver mon matériel des débordements et l'envie de tout enregistrer parce que je vois bien qu'il se passe un truc. Je transpire donc, je vais bientôt saturer autant que mon enregistreur qui a du mal à encaisser la densité sonore des " ayayaï ! ", " biloubiloubilou ! ", et autres " zob ! "... Comme une alarme, une imitation de la sirène de Viré que j'ai entendue à midi retentit... Je prends ça pour une alerte : il faut aller prendre l'air...vite ! Je fuis le bouillonnant réacteur nucléaire et me retrouve devant la buvette... extinction du feu ! Je ne le sais pas encore mais j'ai dans ma bourriche assez de sons musclés pour faire un refrain. J'ai même attrapé un mi bémol qui sera déterminant pour la tonalité du groovin'... Bonne pêche donc, que je complète avec quelques prises en première mi-temps du match suivant : l'équipe A du VLHM contre Selongey. Encore une victoire d'ailleurs, et comme je n'ai pas trop envie de me refaire le réacteur nucléaire, je prends la tangente... De toute façon, j'ai assez de sons pour faire un festin... je vais me mettre en cuisine et préparer un bon " groovin'single " qu'on dégustera tous ensemble, comme on aime bien dire au VLHM : tous ensemble.

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